lundi 8 novembre 2010

D.O.A

C’est vrai j’aurai pu tenter un relooking violent, ou une remise à zéro, format and reboot. Mais que veux-tu lecteur(euse) quand un cabot traîne la patte, quand il se laisse aller un peu partout, quand il montre des signes de vieillesse ou plus encore quand sa tronche ne revient plus, il faut le faire piquer.

Parce qu’il fallait faire peau neuve donc, parce qu’à priori j’ai vraiment recommencé à écrire, parce que l’ancien avait fait son temps, parce que la tronche de Modern life is rubbish était trop chouette, parce que j’ai des copains dans le coin, parce voilà quoi … Rubrikabacs II, le retour de la revanche

Les nouvelles chroniques sont à lire ici www.rubrikabacs.tumblr.com

dimanche 7 novembre 2010

The Housemartins, period.


Et si on se faisait une introduction façon SF pour une fois.
Imaginons une dimension parallèle, un monde alternatif. Dans ce monde, outre le fait que je serais svelte et beau pour changer et parce que ça m'arrange, U2 n'aurait pas survécu à leur deuxième album, se serait séparé au beau millieu des années 80, Duran Duran n'aurait jamais vu le jour et bien d'autres calamités nous auraient été épargnées.

En lieu et place du rouleau compresseur mainstream nommé ci-dessus, The Housemartins vendraient des millions d'albums tous aussi bons les uns que les autres, nous porterions tous fièrement la brosse sans gel et des gilets trop longs, arborerions des bobines de gendres idéaux, danserions comme des demeurés, et ne raterions pas une date live de ce groupe phare dans notre hexagone.
Paul Heaton aurait roulé une pelle au pape et chanté comme un dieu pour les réfugiés de Sarajevo, Norman Cook aurait par miracle épousé une bombe ébène, et Stan Cullimore n'aurait pas besoin d'un bonnet, d'une moustache et d'une tonne de chorus et trois de delay pour faire rêver tous les 6 cordeux en herbe. "London 0 Hull 4" et "The people who grinned themselves to death" brilleraient au firmament des meilleurs galettes que ce monde ( fantasmagorique rappelons-le ) ait connu.
Seule ombre au tableau, je serai passé à côté de Freak Power, n'aurait pas chialé comme une madeleine après mon premier rateau au son de "Song for whoever", Fat Boy Slim n'aurait pas fait virevolter Christopher Walken dans un clip hors du commun.

Revenons donc sur terre.
U2 va bien merci, mais qui se soucie des Housemartins aujourd'hui ? Pas grand monde. Même moi, et ma science quasi infuse, ( merci pour mes chevilles, tout baigne ... ) si mon pote Ludo ( qui écoutait quand même un paquet de trucs pas complètement avouables à l'époque ) ne m'avait pas, un matin d'automne 1995, ramené sous le manteau une cassette de son frère, je serai peut-être resté tout aussi ignorant que toi, lecteur (euse), de ce fabuleux groupe.
J'ai copié la cassette, l'ai usé jusqu'à la corde, et aujourd'hui, comme la cassette est un support has been et qu'internet est mon ami, il est temps pour moi de balancer à la face du monde ou des trois péquins qui prennent la peine de lire ma prose, une salve de cassettes virtuelles d'Heaton et sa bande ( c'est le cas de le dire ah ah !! ).

The Housemartins, c'est avant tout un foutu groupe de soul. Y'a qu'à écouter les lignes de voix qu'Heaton balance de sa voix un poil nasillarde et les choeurs qui illuminent la discographie du groupe pour s'en rendre compte. Le groupe doit plus aux pouliches et étalons de Motown, Stax and Co qu'aux punk anglais et même à leurs illustres prédecesseurs du Swingin' London.

The Housemartins c'est avant tout un putain de groupe de pop extrêmement classieux, passé maître dans l'art du format court mené à toute blinde, de la ligne de basse bien middle et mélodique qui envoie du bois, de l'arpège de Rickenbaker cristallin qui terrasse, de la mélodie accrocheuse qui marque ton tympan au fer rouge dès les premières secondes, et de la rythmique sèche et tonique qui te fait taper du pied et bouger le carafon avant même que ton cerveau ne s'en rende compte.
En bas de l'édition vinyle UK de "London 0 Hull 4" on peut lire : "16 songs 17 hits". Jamais argument marketing n'a été aussi prétentieusement vrai, aussi diaboliquement incontestable, à tel point qu'il ne s'agit même pas d'un horrible sticker éventuellement décollable, c'est indélébile.

The Housemartins c'est avant tout un groupe engagé. Pas de "Fuck you I won't do what ya tell me" cromagnonesque bien qu'exutoire, mais une volée de textes bien sentis et fredonnés avec le sourire à la face de la Queen et de cette bonne vieille Maggie alors au pouvoir de l'autre côté de la Manche. La révolution avec la banane, la contestation joyeuse.
Autant de scuds balancés il y a vingt ans, et encore ( trop ) souvent d'actualité. Essaye celle-là tiens "For too long the ruling class have enjoyed an extended New Years Eve Party, whilst we can only watch, faces pressed up against the glass" ou celle-là "The people who grinned themselves to death, smiled so much they failed to take a breath, and even if their kids were starving, they all thought the queen was charming" ou encore celle-là tiens "Don't try gate crashing a party full of bankers, burn the house down" . The Housemartins fait ainsi figure de pendant politiquement concerné des Smiths ( autre groupe pour lequel je renierais père et mère ... papa, maman ceci n'est qu'une figure de style douteuse ). Bon certes, les angliches étaient également de fieffés religieux, des culs-bénis patentés, et mon côté anti-clérical me force à taire ce volet là de leur engagement. Nobody's perfec,t comme me le chuchote du fond de son caveau le cadavre fraichement recouvert deTony Curtis.

Pour éviter de faire ce qui deviendrait peut-être la première chronique à peu près lisible sans un mot de traviole, il va quand même falloir que je pointe tout de même les quelques menus défauts de The Housemartins. Mais franchement, c'est quelques microscopiques points noirs mériteraient presque d'être passés sous silence.
Quelques slow un peu dégoulinants quoique tout à fait supportables ( "The light is always green" qui fout au passage une belle branlée à Spandau Ballet, "Johannesburg" et ses relents de Gilberto Gil passé à la javel, "Lean on me" où Paul Heaton se prend un peu trop pour un castra de la Nouvelle Orléans ), la traditionnelle minute d'harmonica pub-rock instrumentale ( 3 au total sur les deux albums, on va quand même pas se gêner ) souvent largement dispensable.
Je pensais même flinguer les doo-wop gospel "He ain't heavy, he's my brother" et "People get ready" mais à les réécouter là tout de suite maintenant, je me dis qu'ils ont quand même un sacré charme.

Finalement mon intro philipkdickienne n'était pas si impensable.
Je vis dans cette foutu réalité augmentée. Je ne sais pas qui est Bono, je n'ai jamais entendu parler de U2, et The Edge n'est pour moi que le dernier mot d'un single d'Aerosmith sur "Get a Grip".
Par contre, presque quotidiennement et parfois bien plus en cas de crise aigüe, je m'injecte ma dose d'Housemartins avec le même plaisir sans cesse renouvelé et refuse de voir la réalité en face, le cruel constat qui veut qu'il n'y ait que deux albums et un best of de ce groupe pourtant monumental.
Parfois pourtant je me dis que tout ça n'est pas que le fruit de mon imagination, quand au détour d'une conversation, je mentionne Housemartins, et un de mes interlocuteurs glisse à la sauvette le clin d'oeil du résistant, ou s'il est plus courageux, s'enthousiasme la larme à l'oeil de ne plus se savoir seul sur cette putain de planète à avoir vu passer la comète pop et de ne pas s'en être remis.

vendredi 5 novembre 2010

Belle and Sebastian "Write about love"

Les gens posent souvent des questions cons, faut croire que c'est dans la nature humaine. Parmi cette armada d'interrogations débiles, celle des dix disques à emmener sur une île déserte me hérisse toujours le poil. C'est évident, si on me propose une île déserte avec seulement dix disques dans la valise, je ne pars pas, point barre.
Bon certes, en admettant qu'on me prédise à coup sûr un crash sur un bout de caillasse au milieu de l'océan en revenant de la première tournée interplanétaire d'Alone with King Kong, je prendrai mes précautions et trimballerai une platine et un bon paquet de cire. A coup sûr dans le lot, il y aurait Belle and Sebastian.

Ces écossais sont un véritable onguent, un groupe médicament, de ceux qui te remettent en selle quand tu as atterri au tapis, de ceux qui te font voir la vie autrement que comme un paquet d'emmerdements variés, de ceux qui permettent de rendre le quotidien souvent un peu moins pénible, de ceux à qui je pourrai tout pardonner.
7 albums au compteur, en comptant le dernier qui va dès maintenant passer sur le grill sous tes yeux une nouvelle fois ébahis lecteur (euse), une compil de singles, un live à la BBC et une B.O.
Pas grand chose à redire, fonce sur les singles, oublie la B.O ( bouh que c'est ennuyeux "Storytelling" ), passe ton chemin sur le live ( qui prouve que les prestations vocales de Stuart Murdoch sont loin d'être exemptes de tout reproche ) et craque pour tous les albums, car même les plus faibles ( "Fold your hands child you walk like a peasant" et "Dear catastrophe waitress") recelent toujours quelques perles qui valent le détour.

"Write about love" donc ... tout un programme.
Passons sur l'artwork qui est encore une fois simplement beau, dans la plus pure tradition belleandsebastianesque. Je te raconte même pas comme en vinyle ça a de la gueule.

A la première écoute, la production me gêne un peu, ça manque un poil de profondeur, c'est un peu gros son clinique, mais ce léger malaise disparaît peu à peu. Peut-être pas assez pour que ma langue de travailleuse sociale de bord de nationale se retienne. C'est enregistré à Los Angeles, une fois de plus la preuve éclatante que les grand-britons qui passent l'Atlantique sont souvent mieux servis chez eux, mais on aura encore l'occasion d'en recauser plus loin.

La seconde affirmation de cette nouvelle tentative de chronique potable sera un peu cruelle : ce "Write about love" ne m'a pas envoyé valser sur le fondement. Ce n'est pas mauvais loin de là, mais c'est en général un signe, quand je me cale au fond de mon fauteuil préféré pour écouter un disque et qu'à la moitié de la face A je commence à faire autre chose, c'est qu'il y a un léger souci. Ainsi l'album a tourné plus ou moins en musique de fond ( bouh honte à moi qui déteste ce terme ) depuis une semaine, sans qu'aucun titre ne vienne me chatouiller le tympan, dans le très bon comme le plus mauvais sens du terme.

Pourtant Belle and Sebastian fait une nouvelle fois du Belle and Sebastian, et jusqu'à maintenant ça avait suffit à faire mon bonheur. Mais tout paraît un peu plus terne sur cette album, les titres enlevés sont un peu moins accrocheurs ( "I didn't see it coming" et ses faux airs d'Electric light orchestra, "I want the world to stop" et ses choeurs systématiques pénibles ), parfois même fauchés en pleine montée de sève ("Write about love") , les mélodies moins bien senties ( oh que c'est culcul "Read the blessed pages"), tout ça ronronne gentiment quoi.
Oui je sais, je fais le blasé... si ce disque était le premier opus des écossais à atterrir sur ma platine, je gueulerais vraisemblablement au miracle, là je souris juste gentiment avec une vieille impression de déjà entendu.
Comme toujours deux, trois sillons sortent quand même du lot, "I'm not living in the real world" furieusement sixties et avec une vieille senteur des Who, "The Ghost of Rockschool" une ballade bien ficelée avec un break au tempo tassé malin, "Sunday's Pretty Icons" qui clos l'album sur une touche eighties et un gimmick de gratte franchement lobotomisant.

Et puis il y a le drame de cet album, dernière piste face A "Little you, Ugly Jack, Prophet John" .... les quarante premières secondes font tilt. Des ballades comme ça, Belle and Sebastian en ont pourtant pondu un paquet ( "Mornington Crescent", "Century of fakers" et "Fox in the snow" en tête ), mais dans ce domaine doux amer personne ne leur arrive à la cheville et tous ceux qui ont testé la recette se sont souvent lamentablement plantés. On y retourne donc, rhodes qui tue, batterie sèche, dépouillement et groove retenu,pelle cristalline, mélodie à se damner qui te perfore le lobe frontal d'entrée de jeu. Ca serre le ventre, ça titille les glandes lacrymales, mais ça ne dégouline pas, ça reste d'une retenue salutaire.
Et soudain, tout valse dans le décors direction le gâchis complet, la faute impardonnable. Attention éloigne les enfants et autres oreilles chastes de l'écran : putain de bordel de merde, c'est pas vrai, qu'est-ce qui leur a pris à ces connards d'écossais serrés dans leur pantalons trop courts de faire un duo avec Norah Jones ! Les bras m'en tombent...

Pourquoi faire appel à cette médiocre pisseuse ? La fausse crooneuse pour vieillard à l'oeil torve, la diva simili-jazz à cinq centimes d'euros pour enseignant branchouille inconditionnel de Télérama vient tout foutre en l'air, tout. Complètement à côté de la plaque la gonzesse.
Finie la retenue, là on y est, elle déboule avec ses gros sabots, son vibrato infecte, ses cordes vocales putassières qui t'indiquent d'un gros doigt vulgaire quand il faut commencer à trouver ça beau avec un grand B ....

Toujours difficile de démêler le coupable de la victime dans ce genre de situation, de décider sur lequel des deux tomber à bras raccourcis. Si c'est la bande à Murdoch qui a fait appel à cette grouillotte de bas étage, alors je jure de ne plus jamais acheter un album de Belle and Sebastian ( enfin avant le prochain quoi.... je sais, j'ai le pardon pas cher ), ils auraient pu au moins se rendre compte du massacre après la séance. Si c'est Norah Jones qui a demandé, ce qui tiendrait du mystère insoluble, on aurait quand même pu sympathiquement mais fermement lui montrer la sortie. Si même Belle and Sebastian se met à céder aux sirènes du duo radiophonique respectable et commercialement viable, je n'ai plus qu'à me pendre.
Pourtant qu'elle était bien à sa place sur Peeping Tom à sussurrer des insanités à l'oreille de Mike Patton, elle en était presque remonté dans mon estime... là retour à la case départ, cette pouffe m'a ruiné mon Belle and Sebastian.
Le duo avec l'inconnue Monica Queen sur le maxi "Lazy line painter Jane" a quand même une tout autre gueule, ils pouvaient pas la rappeler elle ? Ou Isobel Campbell ? Ou Cerys Mathews de Catatonia ? Même la femme de ménage du studio n'aurait pas fait pire. Bref, NORAH M'A TUER... j'enrage.

Bilan de l'opération, "Write about love" est à mon sens un album finalement moyen, peut-être celui que j'aime le moins de la totalité de leur discographie... "Life Pursuit" sentait un peu le renouveau, lorgnait sur le rock'n roll, était souvent très bon sans être mortellement inspiré. "Write about love" est son exact négatif, souvent décevant sans être pour autant mortellement mauvais.

Cheap yet precious

Les plaisirs à petit prix sont rares en ce bas monde. Dans ce Nord consumériste, pour la qualité,comme le style, il faut souvent ne pas hésiter à affronter le courroux de son banquier ou tirer un trait sur un tant soit peu de classe. Tente donc lecteur (euse) d'acheter un ersatz de Converse made in Chaussland, une pelle de chez Lag ou même une Logan tiens ...

Heureusement qu'il reste de petits îlots de résistance, ou plutôt des océans de bacs à vinyls remplis de galettes de deuxième ou de troisième voire même de vingt-cinquième main, communément appelés cheapos, pour faire exception à la règle.

Ca tombe bien, La Face Cachée, le disquaire quasi en bas de chez moi, vient d'ouvrir un deuxième magasin remplit de ces cheapos que j'affectionne tant. Vu la part non négligeable de salaire que lui laissent une foultitude de gugusses de cette bonne vieille ville de Metz, à un rythme presque mensuel, Médé, le taulier, nous devait, à moi et beaucoup d'autres, bien ça.

Pourtant, j'en suis la preuve vivante, et en ai fait moi-même l'expérience pas plus tard que la semaine dernière, la magie du marketing, le vaudou du commerce sont ainsi faits que cette nouvelle échoppe, "La face B", située juste de l'autre côté de la "A", ne peut au final qu'alourdir encore le poids du budget son d'un ménage comme le mien.

Tous les scénarii sont plus inévitables les uns que les autres : à 3€ le cheapos, tu te dis que tu peux bien te permettre d'aller jeter un oeil en face aux sorties qui affichent trois fois ce prix, si tu commences par ces dernières, tu te dis que tu n'es plus à 3€ près, et puis après tout c'est sur le chemin pour rentrer du centre-ville, on est quand même pas aux pièces... Face à un tel traquenard, je me dis souvent qu'on devrait m'accorder l'Ordre du Mérite pour ne pas avoir depuis 3 ans que je lorgne, que dis-je que je bave, que dis-je que j'en rêve jour et nuit, péter une pile et fait flamber la CB pour décrocher ce foutu coffret 8LP du Orphans de Tom Waits qui trône en haut des étagères.

Ayant donc trouvé un nouveau prétexte pour passer devant ce piège à mélomane savamment orchestré, deux heures à tuer avant de monter le matos pour un concert au Rubis, plutôt que d'aller tenter une sieste pourtant bien méritée après 5 jours de tournée, me voilà donc qui pousse la porte de la Face B jeudi dernier.

Je n'ai pourtant pas l'âme du chineur.
Les brocantes qui sentent le grenier, les frippes poussiéreuses me gonflent de manière générale, même si j'avoue faire deux ou trois expéditions annuelles chez Emmaüs, des fois qu'un imbécile aurait décidé de se séparer de l'orgue Hammond de grand-père ou de la Les Paul Custom de papa... au prix d'une couverture en polaire pour deux sans abris, faudrait quand même pas rater une occasion de faire sa B.A. Certes pour l'instant le butin ne se monte qu'à un Bontempi orange à soufflet mais on peut toujours espérer.
Par contre, plongez-moi dans une mer de cheapos, et l'étincelle du fouilleur s'illumine dans mes yeux. Même si je dois me taper deux cent cinquante 7' de Claude François avant de tomber sur la perle rare, même si je dois choper des ampoules aux doigts à force de passer les pochettes en revue, je ne laisserai pas un bac, pas un.
Il faut dire que c'est souvent comique les bacs à pas cher... le nombre de merdes qui s'y trimballent, le nombre de cadeaux débiles potentiels qui n'attendent que l'oreille sourde ou la main mal intentionnée pour atterrir à la caisse. Combien de Verchuren dans leur jus, combien de Dalida immondes, combien de compils infectes, combien de groupes de yéyé nauséabonds, combien de marins, combien de capitaines ... je m'égare.

La pêche de ce jeudi fut bonne et surtout surprenante... parce que 3€ ça permet de faire des essais.

THE STYLE COUNCIL - GROOVIN'
THE STYLE COUNCIL - MY EVER CHANGING MOODS


On ne présente pas Paul Weller hein ? Bon d'accord, je reprends mon bâton de pèlerin et contribue une nouvelle fois à ta culture générale, lecteur (euse).
Paul Weller au départ c'est The Jam, le groupe Mods qui a tout dynamité sur son passage avec un "In the city" dévastateur en 1977 et que tu vas me faire le plaisir d'aller écouter séance tenante, tellement ça déboîte, ça remue, ça tabasse, et ça sonne. Du rythm and blues joué à trois cent à l'heure par des petits blancs becs londoniens fins énervés et salement amochés par la vague punk. Un monument du rock'n roll à elle toute seule cette galette.
J'ai mis un paquet de temps à m'en remettre d'"In the city", avant de prendre une seconde torgnole avec "This is the modern world" , mais il faut reconnaitre que The Jam broutent un peu par la suite, accusant une sévère baisse de régime sur les derniers albums avant le split en 1982.
Paul Weller ne refait surface dans ma discothèque qu'avec l'album solo "Stanley Road" en 1995... De ce qui s'est passé pendant ces 13 ans je ne savais encore rien ... mais comme je le disais à 3€ ça se tente.
Autant le dire de suite, j'aurai pu continuer à vivre sans écouter The Style Council, je me serai peut-être même un peu mieux porté, et ce bon vieux Paul n'aurait peut-être pas vacillé sur son piédestal l'espace du premier quart d'heure qu'il m'a fallu pour écouter ces deux maxis et du second pour trier l'acceptable de l'impardonnable.

Les années 80 ont un énorme point commun avec le fromage, à ceci près que je les adore, ça pue souvent très fort de prime abord et ça se révèle souvent bien meilleur qu'on le pensait.
Passons donc sur cette prod hyper froide, ce son raide et sans grand relief, ce mix des voix ultra lisse, ces synthés qui schlinguent, et commençons par la mauvaise surprise.
"Groovin" est un véritable carnage, un hybride foireux entre soul raccolo-dégoulinante schmoovy et pop mal gaulée... rien que le walking slappé de la basse mesure quatre du "Big boss groove" de la face A est un vomitif radical. Les cuivres en font des tonnes, mais finalement moins que la dulcinée de Weller ( pourtant ex-choriste de Wham ! ) qui te balance des choeurs téléphonés et des effets de chanteuse à voix qui me font littéralement sauter au plafond. Même Weller a du mal à tirer sont épingle du jeu, la voix est claire, sans âme, beaucoup trop propre, mais ce n'est finalement rien à côté de son acolyte aux claviers qui envoie des voicing et des chorus de piano et d'orgue dignes d'un Charlie Oleg paraplégique ivre mort.
Et pourtant il y a une légère lumière au bout du tunnel : un refrain imparable, de ceux qui mettent la banane dans la seconde, font du couplet suivant une belle traversée du désert, et sauvent le morceau du naufrage complet.
La face B est encore pire, avec un "You're the best thing" digne d'une B.O de divertissement pour adultes avec ses inévitables cordes au DX7 et sa basse fretless qui pue. On ne va donc pas perdre de temps, le mien en tous cas, parce que le vôtre est quand même le cadet de mes soucis.

"My ever changing moods" tiens par contre toutes ses promesses. Une bonne de pop song bien gaulée, et qui envoie. Même si de prime abord, les défauts du précédent maxi pourraient plomber celui-là tout pareil ( saleté de guitare whawha en arrière plan, congas pénibles, son de basse douteux.. ), reste que le titre est quand même bien meilleur, bien plus catchy, plus contrasté... faut pas hurler au chef d'oeuvre non plus, mais ce Style Council là tiens la dragée haute à George Michael et Lloyd Cole. A la hauteur de ce qu'on peut espérer d'un Weller en forme quoi.
La face B attaque avec "Summer Autumn", un guitare voix acceptable bien que peux inspiré et produit avec un manche de pioche, qui dégénère avec un synthé de plus à oublier dans les meilleurs délais . Le deuxième titre "Mick's Company" ne fait qu'enfoncer le clou quant au peu de bien que je pense de Mick Talbot, le grouillot de claviériste qui livre ici un instru proche de la démo de clavier de chez Auchan.

6€ pour un titre et refrain, j'aurai pu mieux faire, mais au moins je suis désormais un peu moins con, j'ai écouté The Style Council, et je vais pouvoir retourner l'esprit tranquille à "Stanley Road" et "Heavy Soul".

ROXY MUSIC "Avalon"

La claque que j'ai pris en découvrant Roxy Music. Les trois premiers albums sont juste fabuleux. Brian Eno n'était pas encore chiant et ne produisait pas encore Coldplay et U2, Brian Ferry n'avait pas encore la dégaine de Franck Michael qui fait les promo pour du pâté au rayon frais de ton supermarché favori le samedi après-midi.
On m'avait prévenu qu'"Avalon" était mauvais. On ne m'avait pas prévenu que la pochette pouvait largement postuler au titre des cover les plus laides de l'histoire. Y'a quand même des graphistes qui méritent des baffes ( on pourrait même remplacer le deux f par deux l non ? )
Mais voilà, piste 1 face A .... "More than this". Tout est dit. Ceux qui ont vu "Lost in Translation" se souviennent de la version de Bill Murray, ou à défaut sauront maintenant de qui est ce morceau. Je ne connaissais pas l'original, il fallait donc une nouvelle fois que je me culture.
Nom d'un vieux barbu omnipotent que ce titre est énorme ! La ballade up-tempo de génie par excellence. Certes on retrouve une nouvelle fois les odieux stigmates des eighties, mais bon sang que le songwriting frôle la classe ultime ( aux nappes de synthé et ad-lib de guitare caca près ), que Brian Ferry chante comme un dieu que ça m'en fout la chair de poule rien que de l'écrire.
Et que la chute est rude et longue... tout le reste du disque est clairement à jeter, exception faite d'"Avalon" qui reste audible et pas si désagréable ( mais merde quand même, le solo de sax et la fretless avec chorus, c'est pas encore interdit par la convention de Genève ? ).

The Maisonettes "Heartache Avenue"



Ma main droite au feu que tu n'as jamais entendu parler des Maisonettes, à moins d'être comme moi un inconditionnel de Belle and Sebastian et d'avoir remarqué que deux des membres ( en l'occurence les deux choristes ) sont créditées sur le maxi "Legal Man". Ce titre de Belle and Sebastian figurant dans mon top 10 des meilleurs titres écossais de tous les temps, quand je tombe sur un maxi des Maisonettes entre un Rika Zaraï et un best of de Johnny Winter, je n'hésite pas une demie seconde.
Le hasard est parfois un sacré blagueur, et je suis parfois un handicapé qui s'ignore. J'ai posé la face B en premier.
Premier titre "The last one to know", un slow qui tue. Pour du 83 ça sonne bien organique, presque chaleureux, pas de faute de goût ou de signe des temps, c'est hanté par le fantôme de Brian Wilson ( le pont surtout ), un petit gimmick de gratte et trompette dans le lointain façon Burt Baccarach, une mélodie qui tient la route... putain mais ça a l'air bien les Maisonnettes tous seuls dis-donc. Deuxième titre plutôt bien foutu, refrain catchy qui va bien, choeurs imparables à la Tamla, format un poil court et léger arrière goût d'inachevé. C'est tellement la bonne surprise que je me remets la face tiens.

Ma main gauche au feu que tu connais la face A. Je devrai arrêter ce genre de pari ou je vais finir grand brûlé. "Heartache avenue", sur le papier, moi non plus ça ne me disait rien, il m'a suffit de 15 secondes pour mesurer mon erreur. Putain de tube planétaire à l'époque j'en suis sûr, j'ai entendu ça quand j'étais gosse. Et la vache que c'est bon ! Ca sonne soul à bloc, ça stimule l'arrière train, c'est frais, et encore une fois ces deux choristes tiennent carrément la baraque debout. Pour tout vous dire, même ce foutu synthé qui permet une nouvelle fois de faire l'économie d'une section cuivres, a son charme, et je me demande presque si je ne le préfère pas à de vrais binious joués live. Franchement si Phil Collins avait eu du goût, des cheveux, et ne s'était pas pris les pieds dans le tapis en tentant vainement de reprendre The Supremes, il aurait remonté ses manches, rasé sa nuque longue et écrit "Heartache avenue", ça m'aurait aidé à supporter les fins de soirées trop arrosées chez un pote fan du Phil. Au lieu de ça c'est le frontman inconnu, des pas plus connues Maisonnettes, du nom de Lol Mason (qui ressemble d'ailleurs à s'y méprendre à Lonsdale dans Moonraker... lol hein !! ) qui lui chourave le poste de meilleur titre façon Motown non signé chez Motown.
Une fois n'est pas coutume, je vais même te mâcher le boulot et tu pourras écouter les Maisonettes ici : http://www.youtube.com/watch?v=HjziECMPgyk avant de te ruer sur le premier bac à cheapos venu, parce qu'après tout, comme on nous le serine tous les matins, c'est la crise.




vendredi 15 octobre 2010

Les concertos pour piano

L'avantage d'avoir un blog, c'est d'avoir la possibilité d'y écrire tout sur n'importe quoi en s'imaginant simultanément que sa prose à une quelconque importance et qu'il existe un paquet de quidams pour écouter en hochant la tête d'approbation. La psychothérapie à la portée de tous les claviers, l'exutoire illusoire.
Prenez donc place Monsieur, allongez-vous sur le sofa, laptop sur les genoux et dites-moi donc.

Je hais le piano. Non pas que l'objet en tant que tel m'ait un jour fait quoi que ce soit, pas de trauma dans ma petite enfance, pas de travail acharné sous l'oeil torve d'une vieille professeur célibataire frigide qui sent la maison de retraite, pas de rupture amoureuse avec une pianiste de génie partie avec un pianiste tout aussi génial. Que veux-tu, lecteur(euse) j'ai ça chevillé au corps, le piano c'est pas pour moi, ni pour mes oreilles d'ailleurs.
Ni chez Clayderman et Céline Dion ( R.A.S ) ni chez Lennon, ni chez Radiohead, ni chez Belle and Sebastian, et Carole King. Même les premier albums de Tom Waits me filent la nausée. Pas plus chez Monk, Jelly Roll Morton et Fats Waller, bien que chez les sus-cités, le génie de la musique elle-même m'aide à supporter l'instrument. Au sommet de cette pyramide de dégoût pianistique se trouvent la majeure partie des concertos pour piano du répertoire classique, nous y reviendrons.

Alors c'est bien beau cette avalanche de méchanceté gratuite envers un instrument que je ne côtoie pas souvent, voire même rarement, et que je pourrais très bien choisir d'ignorer superbement, mais vas-tu me dire, pourquoi tant de haine ?
Bonne question. Il faut parfois savoir chercher des réponses aux interrogations les plus inutiles. C'est même souvent vital.

Tout d'abord le piano c'est populiste. Je n'arrive pas à envisager ne serait-ce qu'une demie seconde de pouvoir porter dans mon palpitant trop étroit un instrument dont monsieur tout le monde ( c'est-à-dire toi lecteur (euse) est-il besoin de le rappeler ) peut sortir un son comme ça, sans effort, sans apprentissage, sans sang, sueur et larmes. Et même pas un son cradingue comme le premier archet frotté sur une corde de violon, ou le premier vagissement nasillard d'une hanche double incontrôlée, non, non, non, un son potable, audible... un son de piano quoi.
Même la justesse, l'intonation, est préfabriquée. Un pianiste ne s'accorde pas. Une tierce personne s'en charge. Du coup, un pianiste qui joue faux n'est absolument pas coupable, c'est tout juste si on ne le plaint pas le pauvre : il est même victime d'un accordeur de piano qui ne sait pas faire son boulot.
Ce juste son lambda à la portée du premier venu, ça tue le métier ( et pas seulement des accordeurs dont il est question plus haut ), ça lamine la magie.

Il en va de la justesse comme du reste, un piano c'est binaire, faux ou juste, noir ou blanc, t'appuies ou pas. Les pains géniaux, les canards bien sentis n'existent pas au piano, la binarité de l'instrument n'autorise même pas ce genre d'accrocs heureux. C'est la bonne touche .... ou pas.

Comme le clébard et celui qui tient sa laisse, en musique il n'est pas rare qu'un mimétisme certain puisse être relevé entre l'instrument et l'instrumentiste.
CQFD. Je déteste les pianistes ( comme je déteste les trois quart de la terre entière me direz-vous, je ne suis plus à ça près ).

Le pianiste est au musicien ce que l'attaquant de pointe est au footballeur. Une fois que tu lui files le ballon, il le garde pour lui, et se retrouve en prime sous les projecteurs quand par hasard, il finit par en mettre une au fond en une heure et demie de jeu. Le grouillot de milieu de terrain qui court comme un dératé, tout le monde s'en fout.
Les pianistes jouent donc seuls. Même quand il sont accompagnés. Et en prime moi, et la majeure partie de mes collègues de l'orchestre encore concernés par leur travail, on est de surcroit priés de les suivre.
Au cocktail mondain d'après concert on pourra à loisir s'extasier devant la virtuosité du pianiste, son touché de velours, son interprétation lumineuse... de l'orchestre pas un mot sauf si, bien sûr, il n'a pas réussit à coller au train du divin soliste et de ses caprices musicaux, justifiés ou non. Et là on ne viendra pas dire au soliste "Oh coco faudrait penser à t'acheter un métronome et écouter tes copains derrière."

Pour finir, il y a les concertos pour piano. Concerti même, devrais-je dire pour les ritalophones de l'assistance.
Les concertos pour piano sont à la musique savante ce que le métal symphonique est à la musique populaire. Une purge sans nom émaillée de quelques bonnes surprises. Je suis même étonné que les guitaristes chevelus dévaleurs de manche ne se soient pas encore intéressé à ce répertoire pourtant si riche en diahrées de notes et dégoulinage de traits plus vite que la lumière. Peut-être parce que ces mêmes chevelus n'ont que cinq doigts disponibles contre dix pour les pianistes... ça fait quand même un putain de challenge.

Listz ou Litsz ou Litzs ( je ne sais jamais ou se mets se foutu z donc autant prendre des précautions ), St Saens, Chopin, Tchaïkovsky, Schumann...pas un n'a réussi le prodige de me foutre les poils avec un concerto pour clavier.
C'est toujours la même chose, virtuosité à gogo, mélodies tire-larme ou pisse-mémé c'est au choix, le tout saupoudré du bon goût des pianistes ( même les plus brillants d'entre eux ) pour le rubato sans limites... et moi ça m'emmerde. Comme si le fait d'avoir dix doigts sur le clavier rendait criminel le fait de jouer une note isolée, sobre, un son pour un son.
Même sans le son, ou plutôt en se bouchant les oreilles, l'inclinaison des ces mêmes pianistes pour les tenues de scène rococo ( ah Brigitte Engerer et son peignoir de lumière piqué à l'ex-maîtresse de Boris Elstin .... ) et les mouvements circulaires ou semi-circulaires ou encore d'avant en arrière suffisent à me mettre littéralement le mal de mer.

Heureusement parfois, les jours où je suis peut-être un peu moins de mauvaise foi voire un peu moins con, j'ai eu des bonnes surprises.
Beethoven d'abord, le sourdingue de service et ces sonates pour clavier démoniaques qui poussent tout les potards sur onze, mettent tous les vumètres dans le rouge. Ca va trop vite, c'est trop construit, trop impressionnant, trop violent, trop doux, trop sensible, trop tout ... L'uppercut que m'a collé le dernier mouvement de l'Hammerklavier !
Ravel ensuite. Deux concertos pour piano, deux claques, deux putain de chefs-d'oeuvre. Je me souviens encore de Muraro et de son battoir gauche sur-dimensionné qui savait si bien souligner sobrement ( c'est suffisamment rare pour être noté ) que les fantômes du jazz hantent le grenier de ce bon vieux Maurice.
Prokofiev, Bartok et Grieg sont aussi dans le top five et hors catégorie : Hans Peter Kyburtz, dont le concerto m'a carrément scotché et m'a, l'espace d'un instant, fait voir qu'un autre piano était possible, qu'on pouvait dépoussiérer et même secouer cette foutue institution vieille comme le monde.

Pour finir , je n'aime peut-être pas le piano, les pianistes et les concertos pour piano parce que je suis moi-même passible d'un zéro pointé les mains sur un clavier. Poser les doigts sur les touches et vous comprendrez.
Un clavier de piano c'est un foutu continent, un espace immense sans repères, un monstre lisse et bi-chrome dont je ne parviens désespérément pas à comprendre l'anatomie, que je ne saurai vraisemblablement jamais dompter. Et pourtant qu'est-ce que ça doit être chouette de savoir jouer du piano ....

Bien Monsieur, relevez-vous la séance est finie. Ca va mieux ?
Tant mieux, parce qu'il faut que je te laisse lecteur (euse) je joue le premier Concerto de Chopin dans une heure dix ...

dimanche 10 octobre 2010

Motorama - Alps

Je suis né l'année de la mort de John Lennon et Ian Curtis . Pas de quoi la ramener, vous me direz que tout le monde s'en fout et que je ne dois pas être le seul, et pour une fois vous avez très vraisemblablement raison.
Ma pauvre existence n'a finalement eu qu'un faible laps de temps commun avec ces deux comètes de la musique moderne.

Le premier pas besoin de le présenter, même les plus bas de plafond d'entre vous, lecteur (euse) ont dû un jour caresser l'espoir d'une galloche fugace avec Cindy, la bombe de votre classe de 6e, sur fond d'"Imagine".
Le deuxième fut ( séquence culture générale : en cas d'acquis déjà validé, passez au paragraphe suivant ) le frontman épilleptico-suicidaire à voix d'outre-tombe qui pendant 4 courtes années grava dans le vinyle avec Joy Division les galettes les plus flamboyantes, les plus urgentes et les plus dramatiquement mal jouées de la deuxième moitié du vingtième siècle avant de tenter de faire de la balançoire avec la nuque dans sa cuisine un beau matin de mai.
Ses disques m'ont retourné à jamais. Cicatrices indélébiles sur les deux tympans.

Depuis, à chaque fois qu'un groupe me fait le coup de "sonner comme" ou du revival post-punk new wave, je mords à l'hameçon et le relâche presque aussitôt.
Interpol et son "Turn on the bright lights" m'aurait presque tiré les larmes avant qu' "Antics", "Our love to admire" et le dernier "Interpol" ne les fassent sécher d'ennui. Editors m'avait fait l'effet d'un pétard mouillé.
Ainsi donc, il me faudrait me contenter des éphémères effluves déprimo-groovy mancuniennes d'un Joy Division passé de vie à trépas quand j'étais occupé à faire le chemin dans l'autre sens. Plus jamais je n'aurai l'occasion de revivre ce moment de découverte fascinant, ce lendemain de foire ou le nez dans le café noir j'avais mis "Unkown Pleasures" sur la platine...

Et puis samedi, hier pour être plus précis, alors que je participais modestement à une émission de radio associative, dont on ne cessera de répéter à quel point elles sont précieuses, un des animateurs à mis ça : Motorama. Des Russes. Un bon morceau à première vue.
Fallait rester concentrer, j'avais des titres en live à assurer, j'ai écouté d'une oreille distraite et décider de noter le nom dans un coin encore accessible et vierge de ma boîte crânienne.

De retour à casa, internet est mon ami, je me mets à la recherche des russkofs en question pour en écouter plus et mieux.
Et là, si j'avais fait voeux de chasteté et que j'aimais me lever tôt le dimanche, je hurlerai au retour du messie.
Toutes mes images d'Epinal Russes sont balayées en deux accords de guitares sèche et cinglantes comme une rafale de zeph un soir de février sur la place rouge.

Déjà ça sonne de la mort... batterie ultra plate, grosse caisse en carton, charley bien devant, guitares claires et bien mediums, basse corde à linge très mélodique, une ou deux nappes de synthé bien senties, et une voix grave noyée dans une reverb à faire tourner chèvre le dernier ingé son boutonneux fraichement émoulu de son école.

Et en prime les morceaux sont dans l'ensemble très bons, et foutent trois à quatre longueurs à la concurrence actuellement en activité.
Ecoutez juste "Wind in her hair", "Ship", "Ghost"...Le tour de force est de nouveau réussi, des titres tristes comme la pierre, chantés par une voix de croquemort dépressif, mais soutenus par un groove bien raide, bien eighties, le seul qui ait jamais réussi à me libérer de ma paralysie chronique du bassin à l'approche d'un dancefloor.

Alors certes, l'anglais est approximatif et l'accent pas si loin de l'ancien cadre du parti fraichement éveillé au délices du marché, les gimmicks de guitares sont simplissimes et jouables avec deux doigts et une main qui sert la vodka, le batteur aurait besoin d'un pacemaker ou d'un métronome, le chanteur d'un accordeur, tout ça est très approximatif, mais ultra-spontané et monstrueusement efficace !

Il ne m'en a pas fallu plus pour chercher directement à acheter la si méchamment bien venue galette made in Rostov sur le Don.... et là stupeur, tremblements..... tout est en téléchargement libre, Motorama n'est pas signé ( en tous cas apparemment ... ). Raison de plus pour se rejouer et se rerejouer ce bel album sur soundcloud ici : http://soundcloud.com/motorama/sets/alpsalbum

mercredi 6 octobre 2010

Twin Pricks - Young at heart

Le père de mon meilleur pote nous l'a toujours dit, "Faut taper en premier et taper fort ". A l'heure où le sémillant jeune barbu ci-dessus prépare peut-être une chronique de mon premier effort discographique presque digne de ce nom, il fallait donc que je dégaine le premier.
J'ai même déjà trop tardé, "Young at heart" est sorti le 4 juin dernier, il n'en reste plus des tonnes et un nouveau 5 titres est déjà en gestation avancée.

Je le redis une dernière fois, ce blog et a fortiori cette chronique sont aussi éloignés de l'objectivité que Lady Gaga de l'art de la fugue. Au moins on est au clair là-dessus.

Premier maxi, disais-je donc, pour les deux Pricks qui n'en sont pourtant pas à leur premier projet ensemble ou séparément.
On n'épiloguera pas sur le passé des deux gugusses, qui balaie les trois quart de la musique moderne de l'électro au hardcore. Si tu le veux bien lecteur (euse) ( et même si tu ne le veux pas, la sortie se trouve en haut dans le coin gauche de la fenêtre ), on va se contenter de parler du contenu de cet EP.

Et y'en a un paquet de trucs à dire. Le premier c'est que ça tient sévèrement le pavé.
Les deux compères sont inspirés, et ces 5 titres qui fleurent bon la pop 90's en sont la preuve.

"A better view" ouvre le bal avec son gimmick de pelle qui vous reste bien entre les tympans, sa batterie rentre-dedans mais pas trop, sont anti-refrain sacrément bien balancé. Une belle entrée en matière, où on fait connaissance avec deux voix complémentaires, celle de Flo haut perchée et mélodique ( Paul Heaton qui aurait pris une bonne giclée de Sterimar dans le tarin n'est jamais bien loin ) et celle de Geo, plus brute, plus medium, sa jumelle façon bluesy-laine de verre.

Arrive ensuite le double crochet au flanc qui te cloue au sol..."Twin Freaks" et son intro rêverie lo-fi qui ne laisse rien voir venir du bourrinage en règle que sera le reste du morceau, concis, tendu et mortellement efficace, suivi d'un "I.R.T.F" qui, malgré son titre genre abréviation pour radio du temps jadis est un hit en puissance, malin, catchy mais pas téléphoné, doté d'un refrain que je me surprends à fredonner régulièrement quand justement je n'ai pas envie de faire comme tout le monde.
Douze première minutes de galette sous forme de sans faute, un départ en trombe qui ferait presque oublier qu'on a déjà avalé plus de la moitié du disque.

"You saved my day" accusera un peu le creux de la vague, l'orage y gronde sans jamais vraiment éclater, et les cocottes de charley sont un poil too much ... dommage donc, car je reste intimement persuadé que le duo tenait peut-être là une bonne réponse au "All systems red" de Calexico. Même la fin du titre me laisse sur la mienne ( de faim ) avec ce cut numérique assassin.
La dernière pépite de cette galette n'en sera que plus douce amère, ce "Fresh like death" au moelleux désabusé sur fond d'arpèges fantômes, que j'ai entendu un paquet de fois dans les murs de feu l'Emile Vache en me demandant bien quels petits malins avaient pu donner le jour à un morceau aussi tristement joyeux ou joyeusement triste c'est au choix.

Comme je suis une langue de dame en petite tenue qui donne du plaisir rémunéré, il faut bien que je dise deux ou trois vacheries quand même, mais va falloir que je me force.
Pas beaucoup d'ombres au tableau... Peut-être cette prod des voix et leur reverb lavabo salle de bain souvent trop prononcée, ce son de batterie un peu clair, ou ce goût pour les formats un poil trop longs, la voix de Flo qui flirt par moment avec l'accordeur et la rupture, ou ce fond d'accent anglo-rombasien (!) ( de Rombas pour les non-lorrains non-initiés ).

Sans transition, sortez les violons, faites péter les kleenex, nous voilà arriver à la conclusion.

Twin Pricks, c'est le groupe dont tout le monde parle ici dans le Grand Est, dont tout le monde a parlé et parlera encore. Le truc "in" de ces 6 derniers mois, le combo des deux mecs les plus en vue de la scène indé messine, qui tenaient la baraque de l'Emile avant sa dernière embardée dans le décor.
Le genre de types que je pensais ne jamais pouvoir approcher, à moins que ce ne soit pour une poignée de main molassonne et deux trois mots tremblants du style "excusez-moi, mais vous êtes cools et c'est mortel ce que vous faites et moi je suis vraiment un petit joueur".
La vérité c'est qu'au-delà de ce mini-phénomène local, derrière cette vitrine plus subie que voulue, il y a deux mecs furieusement passionnés comme on en croise pas tous les quatre matins, modestes, talentueux, humains et capables d'écluser des litres de gnôle sans vaciller ou presque... des gugusses qui vous font vous rappeler pourquoi faire de la musique, ou pourquoi en écouter, pourquoi trainer les bacs à la recherche d'une énième découverte, pourquoi se taper des bornes pour jouer devant quinze personnes et dormir dans un sac de couchage, et pourquoi ne pas abuser de la poire le mardi soir ( private joke .... ). Et si en prime je vous dis que le disque est bon, fini de flemmarder, on va là et on soutient : http://www.chezkitokat.com/welcome/Catalogue2.html


mardi 5 octobre 2010

Katerine - Philippe Katerine



Mes parents, mes amis, ma femme, mes collègues et mon chien ( si j'en avais un ) pourront vous le dire, j'aime assez le second degré, comme même le troisième et ceux qui suivent. Mais y'a des limites, faut pas déconner non plus.
J'avais laissé Katerine à l'apogée de son succès populaire, à l'heure où, élégamment cintré dans un moule-prépuce rose, il chantait d'une voix débilo-comique qu'il adorait regarder danser les gens au bar du Louxor.

L'album m'avait fait gentiment marrer, la démarche du branleur qui pousse le concept de la rentabilité maximale et du retour sur investissement à son paroxysme en faisant un disque avec une groovebox et deux cure-dents aussi.
Pas le genre de galette que j'écouterai à longueur de journée, pas le genre de disque qui me ferait arrêter toute activité musicale en hurlant au génie, certes. Et puis en live ça avait de la gueule, avec feu les Little Rabbits qui transformaient cette pantalonnade synthétique en brûlots rock'n roll foutraque sous le nom de la Secte Humaine.

Mais, comme je le disais plus haut, y'a des limites, faut pas déconner, du bar du Louxor au PMU de Rire et Chansons, il n'y parfois qu'un...faux... pas.

Alors certes les boboïsants dotés d'un demi-tympan pourront toujours convoquer les fantômes du dadaïsme, Duchamp et ses potes, mais comme l'a fort justement dit un jour un copain à moi très fréquentable, "En musique y'a pas de juste milieu, ou c'est bon ou c'est de la merde".

Vous allez me dire, lecteur(euse) que si ce nouvel opus de Katerine penche très clairement du côté de l'étron sans intérêt, pourquoi gaspiller ces quelques minutes au demeurant précieuses à écrire ou lire le moindre mot sur cette daube absconse.

Pour être honnête, il fut une époque encore pas si lointaine où un type comme Katerine me redonnait foi dans la chanson hexagonale. "8e Ciel", "L'Education anglaise", "Les créatures", "Mes mauvaises fréquentations", furent, et sont encore, autant de disques précieux, affranchis du sempiternel patrimoine franchouillardo-cabaret à textes, diablement classes et foutrement bien gaulés.
Semi-échecs commerciaux, petits secrets bien gardés qu'on se refilait sous le manteau alors que la vague vociférante québécoise polluait la totalité des ondes, ces disques de Katerine valaient leur pesant de velours côtelé.

Le problème c'est que la blague "Robot après tout" a marché... foutrement trop marché. Et comme toujours, on a commencé à entendre le bon Philippe dans son plus mauvais rôle au rayon frais des supermarchés, dans les boîtes de nuit branchouilles et les bals de fond de campagne, chez Drucker et consorts, Katerine ne perdant pas une occasion de faire ce que tout le monde attendait de lui : le débile léger vaguement talentueux.

Ce nouvel album n'est donc que la seconde phase de ce qui pourrait bien être l'autodestruction programmée d'un type pourtant très fréquentable au départ....

24 chansons courtes ( point culminant à 3 minutes et des poussières ), 24 titres vite jetés, pour rester poli, mais néanmoins parfois accrocheurs ( je mets au défis quiconque de ne pas avoir envie de se jeter d'un pont pour s'ôter du crâne le refrain de "La banane"), 24 morceaux sans se fouler, sans fond, sans musique, sans âme mais avec un potentiel de chianlie bien au-dessus de la moyenne.
Là où "Robot après tout" faisait dans le minimalisme synthétique, cette galette fait dans la paresse, le pénible et le kitsch à la lisière du vomitif ( "Bla bla bla" et le reste ... )

Les textes sont à l'image des sons ....

Certes encore une fois, la semi-bourgeoisie demi-cultivée et au trois quart sourde vous louera le côté corrosif de la prose de Katerine. "Liberté mon cul" c'est quand même très, mais alors très provocateur, "Téléphone" doit être le procès le plus vitriolé de notre société de consommation, et "Juifs arabes" le plus bel appel à la reprise du processus de paix au proche orient ... mon cul justement, tout ça ressemble à de la littérature digne de celle que j'échangeais sous forme de petit mots avec le peu de potes que j'avais dans ma classe de CP.

Bref à trop vouloir faire le guignol, c'est désormais sûr, le Philippe Katerine que j'aimais est mort et enterré, le dandy aux sous-pull colorés et costards étriqués a passé l'arme à gauche, pour réssuciter sous la forme d'un beauf aux cheveux filasses, à la voix dégueulasse et au style lénifiant.
Pour tout vous dire, même mon clavier en a fait le lapsus, k et l étant si proches.... pour écouter l'album en streaming, j'ai tapé Philippe Laterine... cruel homophone.

jeudi 30 septembre 2010

Guerre et Pétrole ( Collateral Damage )

Je le savais. Je le savais qu'un jour grisâtre et pluvieux, par désoeuvrement, ou par vanité toute personnelle, je viendrai réanimer ce blog qui pourrit gentiment depuis 2007.

De nombreuses fois, j'avais déjà failli remettre le couvert de ces chroniques nostalgiques de cette époque où journaleux lycéen ( non on ne disait pas geek en ce temps là ) je balançais à la face du monde ( c'est-à-dire trois lecteurs et demi ) ma subjectivité musicale teintée de mauvaise foi.

Le défibrillateur a balancé sa décharge il y a approximativement vingt minutes.
Première charge ici : http://recordsarebetterthanpeople.tumblr.com/page/2

On dégage, on recharge et deuxième choc ici : http://thisisthemodernworld.tumblr.com/#1215229586

Le cadavre souffle de nouveau, le mort retâte du clavier.


Black Mountain "Wilderness heart"




J'ai découvert, comme pas mal d'auditeurs plus ou moins moyens, les poilus de Black Mountain avec "In the Future".
Sur le papier, une galette de plus qui n'aurait jamais dû passer le pas de ma porte.
Artwork digne de Marillion ou d'une autre bande de tâcherons progressifs douteux ( à moins que ce ne soit la couv' d'un énième torchon SF de gare de campagne ), formats longs, son seventies, débauche d'orgue, une forte tendance à répéter les même motifs à trois notes pendant des plombes parce que "tu comprends, c'est hypnotique mec".
Pourtant le popeux de bas étage que je suis allait prendre une tarte, terrassé par la puissance folle de ces 50 minutes de rock 70's qui tâche, envoûté par le charme terrible de ces deux voix et de cette prod impeccable.

Il en va de la musique comme du pinard et d'un paquet de trucs dans ce bas monde, il ne faut jamais se fier à l'attaque en bouche.
J'ai beaucoup écouté "In the future", peut-être même un peu trop, et mon enthousiasme initial s'est évanoui. Le vinyle s'est retrouvé à prendre la poussière sur les étagères.
Trop de longueurs, trop de plans hard rockeux qui ne changent de tee-shirt que tous les 6 mois ( le pont interminable de "Tyrants".... ), trop de synthés stériles ( "Wucan" et son arpégiator proche de la caricature ) , trop de passages psychés insupportables sans une dose conséquente de stupéfiants dans les neurones et le raisiné.

Au final, alors que je réécoute cet album pour la première fois depuis un bail pour assurer la complète mauvaise foi de cette chronique, je me rends copmpte qu'"In the Future" reste un bel album, un chouette tour de Deloreane direction 1974, mais bien trop indigeste pour quelqu'un qui déteste les chemises à fleurs, les pantalons pattes d'eph, a toujours fait l'impasse sur Deep Purple, Led Zeppelin, Yes et leurs cohortes de dévaleurs de manches hirsutes .

Mais voilà , Weezer a enfin pondu une vrai bouse, un véritable raté, un disque aussi hideux dans son contenu que son contenant.
Du coup chez le disquaire hier, sous l'effet d'une nouvelle bouffée incontrôlable de thérapie carte bleue, il m'a fallu choisir et troquer le carnage californien pour le grand blanc du Canada.

De retour à la baraque, je mets ce "Wilderness Heart" sur la platine, et dès le premier titre ( cette tuerie de "The Hair song" ) c'est de nouveau la baffe.
Qu'on soit bien d'accord, il y a claque et claque. Là où celle d'"In the future" vous caressait gentiment la joue avec deux phalanges, "Wilderness Heart" vous démonte le maxillaire inférieur avec un poing américain.

Premier point fort, Black Mountain écrit enfin des morceaux, des vrais, avec une structure, un beau travail mélodique et harmonique ( "The hair song" et "Rollercoaster" bordel !!!!! ), frappe fort et juste. Certes, ils retombent parfois dans les vieilles ornières ( les nappes de "Radiant Hearts" ternissent un sacré bijou, le pont de "Wilderness Heart" montre quand même qu'on ne se refait pas hein... ) mais pour en ressortir aussi vite, quand "In the future" s'y embourbait trop souvent.
Les formats ont logiquement subi la même cure d'amincissement, exit les passages interminables qui devaient avoir de la gueule en live mais vous donnaient une envie pressante de changer de sillon sur disque. Le rock a pris le dessus sur le prog, on sent poindre une pointe de pop dans tout ça, et moi je suis carrément aux anges.
Idem sur la gestion des voix, fini le ping pong prévisible d'"In the Future", genre papa poilu quand ça tabasse et maman patchouli pour les passages aériens, on assiste quand même à un vrai boulot à deux voix, qui vaut son pesant d'or surtout quand madame se fâche sur "Let Spirit Ride", qui, comme je le soulignais hier au taulier partiel de Garageland, doit bien être le meilleur morceau de hard rock que j'ai entendu depuis un paquet de temps.
Pour finir, même si la prod d'"In the future" était déjà impressionnante celle de "Wilderness heart" fait l"impasse sur le son plus gras que gras et devient bien plus tendue et hargneuse, mortellement efficace.

En clair, et je me plante peut-être ( ça m'arrive d'ailleurs bien trop souvent ) , mais on est en face d'une sacrée galette, joliment ficelée, catchy sans être putassière ( "The Way to Gone" ), chauffée à blanc et qui montre les crocs. "In the future" était un bulldozer poussif, "Wilderness Heart" une foutue muscle car, le premier une baleine, le second une saloperie de grand blanc affamé. Et en prime, j'oubliais, l'artwork tabasse.

Quant à moi, je ne sais pas si ce blog vient de réouvrir ses portes, je ne sais pas si j'aurai l'envie, le temps, ou les deux, de lui remettre un peu de barbaque dans l'assiette, je ne sais même pas si ce point final est un nouveau coma ou le premier soubresaut d'un énième réveil.